Focus de la réglementation sur les recherches impliquant la personne humaine
Les investigations cliniques
Les objectifs des investigations cliniques sont :
- De vérifier que, dans des conditions normales d'utilisation, les performances du dispositif sont conformes à celles qui leur sont assignées.
- De déterminer les éventuels effets secondaires indésirables dans des conditions normales d'utilisation et d'évaluer si ceux-ci constituent des risques au regard des performances assignées au dispositif.
Au niveau européen, les dispositions relatives aux investigations cliniques sont décrites à l'article 15 de la directive 93/42/CEE.
Ces dispositions précisent les modalités de coordination entre les Etats membres. Ainsi, si un Etat membre refuse ou interrompt une investigation clinique, il communique sa décision, ainsi que les raisons qui l'ont motivée, à tous les Etats membres et à la Commission européenne.
Si un État membre a demandé une modification substantielle ou l'interruption provisoire d'une investigation clinique, il informe les Etats membres concernés des actions qu'il a engagées et des raisons qui les ont motivées.
Ces informations sont renseignées dans la base de données sur les dispositifs médicaux EUDAMED accessibles à l'ensemble des États membres.
L'annexe X de cette directive précise également que tous les événements indésirables graves doivent être intégralement enregistrés et communiqués immédiatement à l'ensemble des autorités compétentes des Etats membres dans lesquels sont réalisées les investigations cliniques.
En droit national, les dispositions applicables aux recherches impliquant la personne humaines se trouvent aux articles L.1121-1 et suivants et R.1121-1 et suivants du code de la santé publique.
Complément : Règlement UE 2017/745 du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux
Le règlement UE 2017/745 du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux va modifier le cadre juridique et réglementaire applicable aux investigations cliniques et l'harmoniser dans l'ensemble des États membres. Au plus tard le 26 mai 2020, date d'entrée en application du règlement, les dispositions seront applicables directement, sans transposition en droit national.
Contexte
La loi Huriet-Serusclat du 20 décembre 1988 constitue le premier dispositif légal français en matière de recherche biomédicale. Elle trouvait sa nécessité dans le besoin d'adapter la législation nationale aux besoins de la recherche, tout en plaçant la protection des personnes au cœur du dispositif et en fixant les conditions techniques et matérielles de telles études.
Depuis des évolutions sont intervenues dans la réglementation nationale, essentiellement dans un but d'harmonisation :
Le dispositif législatif et réglementaire a été modifié par la transposition en droit français de la directive européenne 2001/20/CE du 4 avril 2001 relative à l'application de bonnes pratiques cliniques dans la conduite d'essais cliniques de médicaments à usage humain.
Lors de cette transposition, des nouvelles dispositions ont visé à uniformiser le niveau de protection des personnes quelque soit le produit de santé qui fait l'objet de la recherche biomédicale (RBM[1]).
Elles ont été introduites par la loi n°2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique et son décret d'application n°2006-477 du 26 avril 2006, modifié par le décret n° 2012-597 du 27 avril 2012, ainsi que par les arrêtés et décisions s'y rapportant.
Le cadre législatif a évolué avec la loi n°2012-300 du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine dite loi Jardé (JO du 6 mars 2012) et ses textes d'application.
Les investigations cliniques reposent sur :
- une réglementation européenne et nationale
- des définitions précises des types de recherche
- un rôle défini de l'ANSM et des Comités de protection des personnes (CPP[2])
Texte légal : Réglementation européenne et nationale
D'une façon générale, une recherche impliquant la personne humaine est une recherche organisée et pratiquée sur l'être humain en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales.
Selon l'article L.1121-2 du Code de la santé publique :
« Aucune recherche impliquant la personne humaine ne peut être effectuée : »
« - si elle ne se fonde pas sur le dernier état des connaissances scientifiques et sur une expérimentation préclinique suffisante ; »
« - si le risque prévisible encouru par les personnes qui se prêtent à la recherche est hors de proportion avec le bénéfice escompté pour ces personnes ou l'intérêt de cette recherche ; »
« - si elle ne vise pas à étendre la connaissance scientifique de l'être humain et les moyens susceptibles d'améliorer sa condition ; »
« - si la recherche impliquant la personne humaine n'a pas été conçue de telle façon que soient réduits au minimum la douleur, les désagréments, la peur et tout autre inconvénient prévisible lié à la maladie ou à la recherche, en tenant compte particulièrement du degré de maturité pour les mineurs et de la capacité de compréhension pour les majeurs hors d'état d'exprimer leur consentement. »
« L'intérêt des personnes qui se prêtent à une recherche impliquant la personne humaine prime toujours les seuls intérêts de la science et de la société. »
« La recherche impliquant la personne humaine ne peut débuter que si l'ensemble de ces conditions sont remplies. Leur respect doit être constamment maintenu »
Selon l'article L.1121-1-1 du Code de la santé publique :
« Les recherches impliquant la personne humaine portant sur un dispositif médical sont entendues comme toute investigation clinique d'un ou plusieurs dispositifs médicaux visant à déterminer ou à confirmer leurs performances ou à mettre en évidence leurs effets indésirables et à évaluer si ceux-ci constituent des risques au regard des performances assignées au dispositif. »
Définition : Les types de recherches impliquant la personne humaine
L'article L1121-1 du code de la santé publique définit trois catégories de recherches impliquant la personne humaine :
- Les recherches interventionnelles qui comportent une intervention sur la personne non-justifiée par sa prise en charge habituelle, apelées "recherches de type I",
- Les recherches interventionnelles qui ne comportent que des risques et des contraintes minimes, dont la liste est fixée par un arrêté du 12 avril 2018, appelées "recherches de type II",
- Les recherches non-interventionnelles qui ne comportent aucun risque ni contrainte, dans lesquelles tous les actes sont pratiqués et les produits utilisés de manière habituelle, appelées "recherches non-interventionnelles" ou "recherches de type III". Dans le cadre de ces recherches, le dispositif médical est utilisé conformément à la notice d'instruction ou d'utilisation, sans aucune procédure supplémentaire ou inhabituelle de diagnostic ou de surveillance, et l'affectation du malade à une stratégie médicale donnée n'est pas fixée à l'avance par un protocole de recherche, elle relève de la pratique courante. La décision d'utiliser le dispositif médical est clairement dissociée de celle d'inclure le patient dans la recherche.
En revanche, ne sont pas des recherches impliquant la personne humaine, notamment :
- Les enquêtes de satisfaction effectuées auprès des patients,
les recherches portant exclusivement sur des données existantes (par exemple à partir des bases de données PMSI, SNIIRAM, ...),
- Les études rétrospectives (par exemple à partir de dossiers médicaux) ou prospectives (par exemple dans le cadre du suivi du patient) consistant en une simple collecte de données pour un dispositif marqué CE utilisé dans son indication et dans les conditions de vie réelle.
Rôle de l'ANSM en matière de recherches impliquant la personne humaine
Les recherches interventionnelles de type I menées en France ne peuvent être mises en oeuvre qu'après autorisation de l'autorité compétente, c'est-à-dire l'ANSM. Elle assure la gestion et l'évaluation des recherches interventionnelles de type I portant sur les produits de son champ de compétence, notamment les dispositifs médicaux.
D'une manière générale, l'Agence évalue la sécurité et la qualité des produits utilisés au cours de la recherche, avec l'objectif de s'assurer de la sécurité des personnes qui s'y prêtent. Cette évaluation s'appuie sur sa propre expertise et celle de ses experts externes dans le cadre de groupes d'experts compétents en matière de recherches impliquant la personne humaine.
L'évaluation des dossiers porte sur :
- Les dossiers de demande d'autorisation de recherche interventionnelle de type I
- Les demandes d'autorisation de modifications substantielles de recherche interventionnelle de type I,
- Les déclarations de vigilance au cours de ces recherches : effets indésirables graves inattendus et événements indésirables graves pouvant être liés à la mise en œuvre du dispositif médical,
- Les faits nouveaux, cliniques ou non cliniques, susceptibles de porter atteinte à la sécurité des personnes se prêtant à la recherche et les rapports annuels de sécurité.
Pendant toute la durée de la recherche, l'ANSM peut prendre toute mesure de sécurité (suspension, interdiction).
L'objectif, les conditions de réalisation et de déroulement de la recherche, les modalités d'inclusion, d'information, de traitement et de surveillance des personnes se prêtant à la recherche par les médecins investigateurs et les procédures de recueil des informations sur l'efficacité et la tolérance des dispositifs faisant l'objet de la recherche sont définis dans un protocole préétabli.
Rôle des CPP en matière de recherches impliquant la personne humaine
Pour débuter, la recherche impliquant la personne humaine, quelle que soit sa catégorie (type I, type II ou type III), doit avoir obtenu un avis favorable du Comité de protection des personnes (CPP). Les demandes à l'ANSM (pour les recherches de type I) et au CPP peuvent se faire de façon simultanée.
Le CPP rend son avis sur les conditions de validité de la recherche, notamment au regard de :
• La protection des personnes, notamment la protection des participants ;
• L'adéquation, l'exhaustivité et l'intelligibilité des informations écrites à fournir ainsi que la procédure à suivre pour obtenir le consentement éclairé, et la justification de la recherche sur des personnes incapables de donner leur consentement éclairé ;
• La nécessité éventuelle d'un délai de réflexion ;
• La nécessité éventuelle de prévoir, dans le protocole, une interdiction de participer simultanément à une autre recherche ou une période d'exclusion ;
• La pertinence de la recherche, le caractère satisfaisant de l'évaluation des bénéfices et des risques attendus et le bien-fondé des conclusions ;
• L'adéquation entre les objectifs poursuivis et les moyens mis en œuvre ;
• La qualification du ou des investigateurs ;
• Les montants et les modalités d'indemnisation des participants ;
• Les modalités de recrutement des participants.
Complément : Rapport IGAS sur l'évolution des comités de protection des personnes (janvier 2014)
Ce rapport avait pour objectif d'étudier les différentes modalités possibles d'organisation du recours aux CPP, de préciser la nature de l'évaluation confiée au(x) CPP et de faire des propositions visant à optimiser les délais d'évaluation des projets de recherche.