Focus sur l'intervention d'une autorité compétente en matière de médicament dans l'évaluation d'un dispositif (avis QSU)
Contexte
Les dispositifs médicaux (DM) et les dispositifs médicaux implantables actifs (DMIA) peuvent incorporer une (des) substance(s) qui, si elle est utilisée séparément, est susceptible d'être considérée comme un médicament au sens de l'article 1er de la directive 2001/83/CE et qui agit sur le corps humain par une action accessoire à celle du dispositif. Ces dispositifs sont évalués selon les règles applicables à leur directive respective (93/42/CEE ou 90/385/CEE).
Il est important de garder à l'esprit que pour déterminer si un produit relève de la directive 2001/83/CE relative aux médicaments ou de la directive 93/42/CEE relative aux DM, il est tenu compte tout particulièrement du mode d'action principal du produit final issu de la combinaison.
Exemple : Exemples de dispositifs médicaux combinés avec une substance active
relevant de la directive 93/42/CEE : ciment orthopédique avec gentamicine, stent coronarien imprégné de tacrolimus, colles chirurgicales imprégnées d'albumine sérique humaine ;
relevant de la directive 90/385/CEE : sonde de défibrillateur implantable imprégnée de dexaméthasone.
Exigences essentielles spécifiques pour ces dispositifs
Le point 7.4 de l'annexe I de la directive 93/42/CEE pour les DM et du point 10 de l'annexe I de la directive 90/385/CEE pour les DMIA précisent que « la qualité, la sécurité et l'utilité de(s) substance(s) combinée(s) au dispositif doivent être vérifiées par analogie avec les méthodes prévues à l'annexe I de la directive 2001/83/CE »
Cette vérification met en œuvre une procédure particulière qui va faire intervenir une autorité compétente en matière de médicaments.
Méthode : Choix d'une autorité compétente en matière de médicament pour obtenir un avis sur la substance incorporée
Le choix de l'autorité pour la demande d'avis est en fonction de la nature de la substance incorporée :
s'il s'agit d'un médicament dérivé du sang ou du plasma humain au sens de l'article 1er de la directive 2001/83/CE annexe I, c'est l'Agence européenne du médicament (soit en anglais European Medicines Agency ou EMA) qui sera consultée.
si cela n'est pas le cas, c'est l'une des autorités compétentes européennes en matière de médicament ou l'EMA.
Remarque : Le dispositif incorporant la substance ne doit pas faire l'objet de plusieurs demandes d'avis auprès de différentes autorités compétentes, EMA incluse.
L'ANSM, est en France l'autorité compétente pour le médicament à usage humain.
L'ANSM, comme les autres autorités compétentes en matière de médicament, peut ainsi être consultée par n'importe quel organisme notifié.
Méthode : Procédure de consultation suivie par l'organisme notifié faisant intervenir une autorité compétente
Il revient à l'organisme notifié du fabricant de vérifier, en premier lieu, l'utilité de l'ajout de la substance dans le DM puis de solliciter une autorité compétente européenne en matière de médicament pour un avis sur la qualité et la sécurité de la substance, y compris sur le profil bénéfice/risque lié à l'incorporation de la substance dans le DM.
Pour émettre son avis sur la qualité et la sécurité, l'autorité compétente en matière de médicament prendra en compte le procédé de fabrication et les données relatives à l'utilité de l'incorporation de la substance au dispositif émis par l'organisme notifié.
En pratique, conformément aux annexes II et III de la directive 93/42/CEE ou 90/385/CEE, la procédure d'évaluation de la conformité pour ces DM combinés prévoit que :
- l'autorité compétente doit rendre son avis dans un délai de 210 jours après réception d'une documentation recevable ;
- l'avis scientifique de l'autorité nationale compétente ou de l'EMA doit être intégré dans la documentation concernant le dispositif ;
- en arrêtant sa décision, l'organisme notifié prend dûment en considération les avis exprimés lors de la consultation. Dans le cas spécifique de la consultation de l'EMA, l'organisme notifié ne peut pas délivrer le certificat si l'avis scientifique de l'EMA est défavorable. Enfin, il informe l'autorité nationale compétente concernée ou l'EMA de sa décision finale
Remarque : toutes modifications apportées à la substance médicamenteuse accessoire au dispositif et toutes informations obtenues par l'autorité compétente sur la substance pouvant avoir un impact sur le profil bénéfice/risque lié à son ajout dans le dispositif font l'objet d'un nouvel avis. Concernant les modifications de substance, l'organisme notifié informe l'autorité compétente ayant rendu l'avis initial afin que celle-ci mette à jour si nécessaire l'avis initial. Par ailleurs, dès lors qu'une autorité compétente ayant rendu un avis initial sur une substance reçoit des informations sur cette substance, elle réévalue le profil/bénéfice risque lié à l'ajout de la substance au dispositif et, quel que soit l'avis final, en informe l'organisme notifié.
L'ANSM peut être consultée pour les avis initiaux et les avis complémentaires liés à une modification relative à la substance intégrée au DM combiné à condition que l'avis initial ait été émis par l'ANSM.
Le guide européen MEDDEV 2.1/3 rev 3 « Bordeline products, drug-delivery products and medical devices incorporating, as an integral part, an ancillary medicinal substance or an ancillary human blood derivative » est une aide dans l'interprétation et l'application de ces textes réglementaires pour la réalisation de l'avis QSU.
Méthode : Instruction d'une demande auprès de l'ANSM pour l'avis QSU
Le site web de l'ANSM détaille la procédure de consultation de l'ANSM.
Que la demande entre dans le cadre d'un avis initial ou d'un avis complémentaire, l'organisme notifié devra faire parvenir 3 mois minimum avant la soumission du dossier une lettre d'intention de demande d'avis QSU[1] dans le cadre du marquage CE d'un dispositif médical de classe III selon la règle 13, accompagnée d'un formulaire.
Cette lettre d'intention devra préciser la date estimée de présentation du dossier et une explication scientifique du mode d'action uniquement accessoire de la substance et du mode d'action principal du dispositif, complétée d'une synthèse des modifications apportées à la substance dans le cadre d'un avis complémentaire.
Ensuite, le fabricant et l'organisme notifié préparent conjointement le dossier mais il revient à la charge de l'organisme notifié de veiller à joindre à ce dossier son évaluation de l'utilité de l'incorporation de la substance dans le dispositif.
Dès lors qu'un dossier est recevable, il est transmis aux différentes structures compétentes de l'ANSM en fonction du dispositif et de la substance intégrée. L'évaluation pourra faire intervenir des experts et/ou groupes de travail de l'agence, notamment si la substance est d'origine animale ou si dans sa fabrication sont utilisées des substances d'origine animale, un exemplaire sera transmis à la structure compétente de l'ANSM pour l'analyse de la sécurité virale.
A partir des évaluations (qualité, sécurité,...) le Directeur Général de l'ANSM donnera un avis sur le profil bénéfice/risque de l'ajout de la substance en tenant compte de l'avis utilité fourni par l'organisme notifié.
A l'issue de la consultation d'une autorité compétente
L'avis final de l'autorité compétente sera intégré par l'organisme notifié et le fabricant dans la documentation concernant le dispositif. En arrêtant sa décision, l'organisme notifié prendra dûment en considération l'avis exprimé par l'autorité compétente.
L'organisme notifié ne délivre pas le certificat si l'avis scientifique est défavorable et il fait part de sa décision finale à l'autorité des médicaments consultée.