Focus sur les dispositifs médicaux d'origine animale (DMOA)

Contexte

Pour la fabrication d'un dispositif médical, un fabricant peut utiliser un tissu d'origine animale rendu non viable ou des produits non viables dérivés de tissus d'origine animale.

Pour mémoire, en application de l'article 1.5.f de la directive 93/42/CEE, cette directive ne s'applique pas si on utilise un organe, tissu ou des cellules d'origine animale viable.

La décision de recourir à un tissu d'origine animale doit, en premier lieu, mettre en balance le bénéfice de leur utilisation par rapport au risque au regard notamment des alternatives existantes d'origine non animale.

La sécurité des dispositifs médicaux d'origine animale repose entre autres sur la maîtrise du risque spécifique de transmission d'agents biologiques pathogènes au patient ou à l'utilisateur.

Le risque viral conventionnel a été pris en considération dans la directive 93/42/CEE d'une part, au niveau des règles de classification et, d'autre part, au niveau des exigences essentielles de cette directive (point 8 : infection et contamination microbienne).

Ainsi, en application de la règle 17 de l'annexe IX de la directive, « tous les dispositifs fabriqués à partir de tissus d'origine animale ou de dérivés rendus non viables entre dans la classe III, sauf si ces dispositifs sont destinés à entrer en contact uniquement avec la peau intacte. ». La classe III est réservée aux dispositifs les plus critiques pour lesquels la mise sur le marché présuppose un examen de conception par l'organisme notifié.

Concernant le risque de transmission d'encéphalopathies spongiformes animales, des mesures réglementaires européennes complémentaires ont été jugées nécessaires. Ainsi, la directive européenne 2003/32/CE du 23 avril 2003 remplacée par le règlement 722/2012 a été élaborée dans cet objectif et plus particulièrement pour certaines espèces d'origine animale (bovine, ovine,...). Notons que l'élaboration s'est appuyée sur la base de deux décisions françaises du directeur général de l'Afssaps du 5 mars 2001 et du 11 avril 2001 relatives à l'interdiction de mise sur le marché des substituts de dure-mère d'origine animale et des catguts respectivement.

ExempleDM d'origine animale

Voici quelques exemples, parmi les plus courants de DM d'origine animale :

  • Des renforts pariétaux (imprégné de collagène d'origine bovine ou porcine),

  • Des valves cardiaques et patchs vasculaires (d'origine bovine ou porcine),

  • Des cathéters imprégnés d'héparine (d'origine porcine),

  • Des pansements hémostatiques dentaires (imprégnés de collagène d'origine bovine, équine ou porcine),

  • Des solutions viscoélastiques intraoculaires (à base d'acide hyaluronique extrait de crête de coq),

  • Des produits obtenues par fermentation bactérienne lorsque le milieu de culture ou de conservation contient un réactif d'origine animale (sérum de veau fœtal),

  • Des anticorps monoclonaux obtenus par culture cellulaire qui peuvent contenir des réactifs d'origine animale comme les enzymes, l'albumine ou encore le sérum de veau fœtal.

RemarqueException

Le guide européen MEDDEV 2.4/1 cite des dérivés d'origine animale pour lesquels les DM ne relèvent pas de la règle 17 (stéarates dans les polymères, la lanoline...).

Exigences essentielles spécifiques introduites par la directive 2003/32/CE remplacée par le règlement 722/2012

La directive 2003/32/CE remplacée par lerèglement 722/2012 concerne les risques de transmission d'encéphalopathies spongiformes transmissibles (EST[1]) par les dispositifs médicaux fabriqués à partir de tissus d'origine animale rendus non viables ou de produits non viables dérivés de tissus d'origine animale.

Les espèces animales EST susceptibles sont les espèces bovines, ovines et caprines ainsi que les cerfs, élans, visons et chats.

Elle ne concerne pas les dispositifs médicaux qui ne sont pas destinés à entrer en contact avec le corps humain ou qui sont destinés à entrer en contact uniquement avec une peau intacte.

Tout d'abord, le fabricant doit apporter des éléments justifiant l'utilisation de tissus ou dérivés d'origine animale au regard des matériels alternatifs (origine animale non à risque EST susceptible ou synthétique et des données cliniques supportant le bénéfice escompté).

Ensuite, cette directive donne des indications sur le système d'analyse et de gestion du risque à mettre en œuvre par les fabricants qui comprennent :

1) L'analyse, évaluation et gestion des facteurs clés relatifs à la sécurité du dispositif médical en termes de possibilités de transmission d'agents EST se situant à plusieurs niveaux :

o La sélection des animaux : les animaux doivent subir des contrôles vétérinaires, doivent être propres à la consommation humaine, le choix de leur alimentation minimise le risque de transmission ainsi que les méthodes d'abattages appliquées.

o L'origine géographique des animaux en fonction de la classification RGE.[2]

o La nature des tissus de départ selon la classification de l'OMS.

o Le procédé de fabrication : des procédés d'inactivation et/ou élimination des agents EST sont appliqués.

o La quantité de tissus de départ entrant dans la fabrication du dispositif médical.

o La voie d'administration du dispositif.

2) Le contrôle des fournisseurs de la matière première d'origine animale.

3) La certification EDQM[3] (Certification Secretariat of the European Directorate for the Quality of Medicines). Ce certificat confirme le respect des prescriptions de la Pharmacopée Européenne.

Ces aspects ont par ailleurs fait l'objet :

  • D'une norme européenne harmonisée NF EN ISO 22442-3 Dispositifs médicaux utilisant des tissus animaux et leurs dérivés - Partie 3 : validation de l'élimination et/ou de l'inactivation des virus et autres agents responsables d'encéphalopathie spongiforme transmissible (EST)

  • D'un guide européen d'application MEDDEV 2.11/1 Application of Council Directive 93/42/EEC taking into account the Commission Directive 2003/32/EC for Medical Devices utilising tissues or derivatives originating from animals for which a TSE risk is suspected

Il faut retenir que pour un DMOA[4] à risque EST, le risque de contamination par les agents conventionnels n'est pas exclu ce qui rend indispensable l'application des normes NF-EN 22442-1,-2 et -3.

MéthodeÉvaluation de la conformité par les organismes notifiés du DMOA avec le concours des autorités compétentes d'origine animale dans le cadre de la directive 2003/32/CE remplacée par le règlement 722/2012

L'évaluation de la conformité par les organismes notifiés s'appuie sur les données fournies par le fabricant et sur une procédure spéciale qui fait appel aux autorités compétentes dont l'ANSM. Elle prend en compte :

Les certificats EDQM (Certification Secretariat of the European Directorate for the Quality of Medicines).

Les avis des autorités compétentes sur l'évaluation et les conclusions (sauf dans le cas de DM fabriqués à partir d'un dérivé certifié par l'EDQM) :

  • L'organisme notifié rédige un résumé d'évaluation conformément au point 1 du système d'analyse et de gestion du risque ;

  • Il envoie ce résumé à l'autorité compétente dont il dépend (autorité compétente coordinatrice) ;

  • L'autorité compétente coordinatrice envoie ce résumé à l'ensemble des États membres et recueille leur avis. Les autorités compétentes vérifient que les dispositions de la directive ont été appliquées et que les conclusions sont fondées ;

  • L'avis des autorités compétentes est transmis à l'organisme notifié par l'autorité compétente coordinatrice dans les 12 semaines suivant la saisine par l'organisme notifié ;

  • L'organisme prend en considération les avis des autorités compétentes avant d'établir l'attestation d'examen CE du dispositif médical.

Communication en France

L'article L.5211-4 du Code de la santé publique prévoit que dans la communication faite à l'ANSM par les fabricants, distributeurs lors de la mise en service en France, « les dispositifs médicaux dans la fabrication desquels intervient un produit d'origine animale, la communication ... le précise, ainsi que l'espèce d'origine. »

L'ANSM requiert que pour les DMOA relevant de la directive 2003/32/CE, le certificat de conformité à ladite directive soit joint à cette communication.

Notons que dans le cadre de l'activité de surveillance de marché des dispositifs médicaux prévue à l'article L.5311-1 du code de la santé publique, l'ANSM apporte une attention particulière à cette catégorie de DM et demande souvent des informations concernant le risque microbiologique lié au dispositif communiqué.

A la réception des informations, le dossier de sécurité virale peut être présenté aux experts sur la sécurité virale des produits de santé de l'ANSM.